Il s’agit d’une petite vallée tranquille qui se trouve aux portes de la ville de Brest : la vallée
du Restic. La ville, comme bon nombre de cités de notre pays, se sent à l’étroit et tend à
pousser ses murs pour accueillir toujours plus d’habitants et de véhicules. C’est ainsi
que cette petite vallée tranquille se retrouve, il y a une dizaine d’années, au coeur d’un
projet routier qui prévoit le contournement nord de l’agglomération. Un collectif pour la
sauvegarde de la vallée est aussitôt créé, et c’est le début d’une longue bataille juridique. Ayant
entendu parler de ce collectif qui se bat pour le maintien de la biodiversité ordinaire et qui
plante notamment chaque année un arbre dans la vallée, Caroline de Loor se rend sur place
et tombe alors, au fond d’une parcelle, sur un beau chêne. Il n’est pas très haut, mais il est très
tortueux et son gros tronc noueux porte des « visages ». Il n’en fallait pas plus pour qu’elle lui
attribue ce joli nom de « chêne aux mille visages ». Elle qui aime photographier les arbres, et tout
particulièrement ceux qui lui content des histoires, est véritablement conquise.
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C’est un grand hêtre majestueux, au tronc court et épais, dont émergent des racines
puissantes qui agrippent le sol et quelques rochers. Il est solidement ancré dans une
pâture du petit village de Chavagnac connue sous le nom de « Lou Deime », la dîme.
C’est à l’ombre de ce grand arbre que les paysans venaient jadis s’acquitter de leurs
redevances (la dîme était un impôt sur les récoltes) auprès du seigneur du château,
situé tout près. Le château date du XVe siècle et a été construit sur les ruines d’un édifice détruit
pendant la guerre de Cent Ans. On pourrait presque croire que notre arbre porte les traces de
ces réunions fiscales : c’est comme si les énormes racines ménageaient des places où l’on peut
s’asseoir confortablement, à plusieurs. Josette Alliot, qui a gardé ici autrefois les troupeaux, les
deux Michel et le chien Paco, membres de l’association Chavagnac Avenir, qui a proposé cette
candidature, s’y installent tout naturellement le temps d’une image. Josette nous confie son
souhait de faire perdurer ce rôle de rassembleur, elle voudrait que cet arbre continue à rassembler
et fédérer les habitants. Elle nous glisse que ce géant se situe exactement à mi-distance entre le
pôle Nord et l’équateur. On se dit que cette femme est chanceuse, qu’elle a trouvé son axis mundi.
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Thibault de Lisle se souvient très bien de la première fois qu’il a vu ces deux arbres
accolés, tronc à tronc, au beau milieu de la forêt. C’était il y a presque quarantecinq
ans, ils ne mesuraient alors que quelques mètres de haut. Depuis, il n’a jamais
manqué de venir et revenir voir ces amants sylvestres, si bien qu’au fil des années,
ces arbres, situés à quelques encablures de la maison, sont devenus l’objectif central
des balades familiales. Le couple pourrait paraître saugrenu : l’un feuillu, l’autre résineux, l’un
chêne, l’autre sapin pectiné, l’un roi historique de nos forêts, l’autre symbole de leur exploitation.
Malgré leurs différences, ils ont mêlé leurs racines, rapproché leurs troncs, qui s’effleurent plus
qu’ils ne se touchent, et confondu leurs cimes. Aujourd’hui on pourrait presque croire qu’ils
ne forment plus qu’un seul arbre qui monte droit vers la lumière d’une croissance rapide, mais
sereine, se donnant mutuellement de la force et de la volonté. La définition même d’un couple.
Alors on se presse au pied de ces arbres pour ressentir au mieux cette énergie amoureuse : l’an
passé, dans la famille, on y a même célébré un mariage. Tandis que nous approchons des arbres,
le jour de la prise de vues, c’est le déluge : les amoureux blottis l’un contre l’autre ne semblent
pas vraiment avoir envie qu’on vienne troubler, pour un temps, leur douce intimité. On ne peut
qu’admirer la puissance des sentiments.
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C’est à l’occasion d’une randonnée que Françoise Dassonneville et sa fille Anaïs
découvrent ce gros tilleul. Intriguées par une petite plaque de pierre sur laquelle
est gravé un laconique « Tilleul du Joncquoy planté au XVe siècle », et séduites par
le vieil arbre, elles cherchent alors à en savoir plus. Elles se lancent dans d’actives
recherches, au point de devenir, m’avouent-elles dans un grand éclat de rire, de
véritables spécialistes des tilleuls. Elles apprennent que le tilleul du Joncquoy est un survivant.
En effet, une carte de 1706 indique qu’il y avait là trois autres tilleuls, aujourd’hui disparus.
En 1650, le village d’Aubers est pillé et livré aux flammes. En 1721, l’arbre aurait été foudroyé
et fendu en deux. Durant la Première Guerre mondiale, le village est rasé par les obus, mais
l’arbre, un peu à l’écart des habitations, est miraculeusement épargné. Enfin, en 1999, il résiste
à la fameuse tempête, probablement en raison de sa petite taille et de son tronc trapu. De quoi
susciter le respect ! Il mérite bien de figurer sur le logo de l’office de tourisme de Weppes, cette
petite région de la Flandre française située à proximité de Lille.
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Il est des arbres qui marquent des vies, qui jalonnent les existences. Joël Durand se souvient
parfaitement des heures passées à jouer avec ses copains au pied du chêne du Plessis
Landry, des innombrables allées et venues entre son village de la Richard et le bourg de
La Mothe-Achard à emprunter le chemin qui passe au pied du grand arbre. L’arbre était
le repère, le point de rendez-vous, tout le monde le connaissait et l’appelait « l’arbre » sans
autre développement. Joël aime les arbres et celui-ci, qui l’accompagne depuis son enfance, il le
trouve beau, tout simplement. Il aime l’idée qu’il fasse le lien entre les générations : alors que nous
terminons la séance de prise de vues, une jeune fille rentrant du lycée emprunte le chemin, que
tant d’autres ont parcouru avant elle. Il aime aussi penser l’arbre comme un bien commun, et
pas seulement celui de son propriétaire actuel (qui voit d’ailleurs cette candidature d’un très bon
oeil). Une vie d’arbre est faite de plusieurs vies d’hommes, et celui-ci, plusieurs fois centenaire, ne
saurait mentir. Notre homme, lui, partage la vie de nombreux arbres : on apprend par son épouse
Valérie qu’il se fait offrir un arbre comme unique cadeau pour chacun de ses anniversaires.
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Cabossé, il l’est indéniablement. Il porte les stigmates de ceux qui ont vécu. La cime
a été tronquée en décembre 2018 par une minitornade. Il y a eu aussi des branches
cassées par des tempêtes, des grimpeurs maladroits, le gel, la sécheresse... Mais il
a la peau dure, le cèdre bleu de l’Atlas du centre hospitalier Théophile-Roussel de
Montesson ! Il trône au milieu d’un parc de plus de 30 hectares, sur une aire de jeux.
Des mômes, il en a vu défiler au cours des décennies : des rebelles, des timides, des sportifs,
des rêveurs... Il pourrait raconter les émois, les secrets, les colères, les chagrins, les rêves et
les espoirs des générations d’enfants qu’il a côtoyées. Ce lieu a d’abord été une colonie agricole
et horticole pénitentiaire, inaugurée en 1895. Il est devenu un établissement public de santé
mentale pour enfants, adolescents et adultes, à partir de 1974. Cabossé, mais toujours vivant,
lui, le confident silencieux et bienveillant des tourments. Didier Sigler, directeur honoraire des
soins, qui a présenté la candidature, l’assure : le cèdre a contribué à recoller les morceaux de
nombreuses vies fragmentées.
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Un arbre magnifique dans un jardin magnifique: il est des situations moins avantageuses.
Le ginkgo du jardin botanique de Tours a été planté en 1843. Particularité unique
en France : c’est un sujet mâle sur lequel une branche femelle a été greffée en 1910. Il
affiche aujourd’hui une confortable circonférence de plus de sept mètres et présente
une étonnante forme tentaculaire, qui laisse deviner quelques accidents de jeunesse
– dont il s’est bien remis au fil des années et de l’attention des jardiniers. Betsabée Haas, adjointe
au maire de Tours et écologiste de conviction, a proposé cette candidature. Ce qu’elle aime
tout particulièrement chez cet arbre, c’est qu’il est un symbole de résilience. Le ginkgo est le
dernier représentant d’une famille botanique apparue il y a 300 millions d’années. Il est connu
pour sa longévité et sa résistance aux virus et agents mutagènes. Après l’explosion de la bombe
d’Hiroshima, au Japon, en 1945, un ginkgo renaquit de ses cendres, là où toute forme de vie avait
été anéantie – cette résilience parle d’autant plus à Betsabée que son mari est japonais. Chanteuse
soprano, cette femme aurait un timbre lumineux de beauté. Alors que notre ginkgo commence
doucement à revêtir sa parure dorée d’automne, on se dit que ces deux-là se sont bien trouvés.
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L’histoire n’est pas rare : un collectif de citoyens se forme au Havre pour protester
contre la coupe planifiée d’une rangée d’arbres lors d’un énième projet d’aménagement
urbain qui veut faire fi de l’existant au profit d’une nouveauté entièrement vouée au
minéral. C’est ainsi que Stéphanie Rohart en vient à s’intéresser de très près au sort
des arbres de sa ville. Le Havre a payé un lourd tribut à la folie guerrière et destructrice
des hommes, et les arbres séculaires n’y sont pas légion. Un après-midi d’été caniculaire, alors
qu’elle profite avec son fils de l’ombre et de la quiétude d’un beau platane du parc de l’Hôtel
de Ville, une évidence se fait jour : cet arbre au port harmonieux, dont on peut imaginer qu’il
dépasse la centaine d’années, ferait un excellent symbole des bienfaits apportés par les arbres
en ville. Dans l’agitation et le vacarme urbains, on se dit que c’est sans doute lui faire porter un
costume un peu trop grand... Mais on se réjouit que ce platane ait trouvé en Stéphanie une alliée
attentionnée et bienveillante.
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Dans le parc du Château de la Dauphine (en hommage à Marie-Josèphe de Saxe,
dauphine de France et mère de Louis XVI), deux magnifiques liquidambars d’Orient
coulent des jours heureux. Ils se dressent, majestueux, à côté d’une belle allée de
pins parasols, d’un petit bassin entouré de cyprès chauves, de quelques charmes et
de chênes. Dans ce parc ceinturé de vignes, des alouettes lulu lancent leurs chants
flûtés, des étourneaux sont à la fête à la cime des grands arbres, un roitelet vient se faufiler dans
les branches basses, un pic épeiche crie toute sa joie… Magie d’une matin d’automne. Non loin, on
aperçoit la Dordogne, placide et limoneuse. Il se dit ici que ce pourrait être des graines apportées
en guise de cadeau depuis Versailles (au XVIIIe siècle, les vins de Fronsac étaient les plus chers
du royaume et les favoris de la cour) qui ont engendré ces beaux sujets. Ces arbres seraient les
liquidambars d’Orient les plus vieux et les plus gros de France, voire d’Europe. Ici, on est aux
petits soins pour ces spécimens et leur environnement. Stéphanie Barousse, la directrice du
domaine, précise que depuis 2009 les 53 hectares du domaine sont conduits en biodynamie.
L’attention portée au vivant semble donc être ici de tous les instants.
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Dans le parc du Château de la Dauphine (en hommage à Marie-Josèphe de Saxe,
dauphine de France et mère de Louis XVI), deux magnifiques liquidambars d’Orient
coulent des jours heureux. Ils se dressent, majestueux, à côté d’une belle allée de
pins parasols, d’un petit bassin entouré de cyprès chauves, de quelques charmes et
de chênes. Dans ce parc ceinturé de vignes, des alouettes lulu lancent leurs chants
flûtés, des étourneaux sont à la fête à la cime des grands arbres, un roitelet vient se faufiler dans
les branches basses, un pic épeiche crie toute sa joie… Magie d’une matin d’automne. Non loin, on
aperçoit la Dordogne, placide et limoneuse. Il se dit ici que ce pourrait être des graines apportées
en guise de cadeau depuis Versailles (au XVIIIe siècle, les vins de Fronsac étaient les plus chers
du royaume et les favoris de la cour) qui ont engendré ces beaux sujets. Ces arbres seraient les
liquidambars d’Orient les plus vieux et les plus gros de France, voire d’Europe. Ici, on est aux
petits soins pour ces spécimens et leur environnement. Stéphanie Barousse, la directrice du
domaine, précise que depuis 2009 les 53 hectares du domaine sont conduits en biodynamie.
L’attention portée au vivant semble donc être ici de tous les instants.
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